À la faveur des troubles qui marquent la fin de l'Ancien Empire, les
interdits religieux ne sont plus respectés, et la richesse change de
mains.
« La Sublime Salle de Justice, ses écritures sont enlevées,
les places secrètes sont divulguées. Les formules magiques
sont divulguées et deviennent inefficaces, parce que les hommes les ont
dans leur mémoire. Les offices publics sont ouverts ; leurs
déclarations (titres de propriété) sont enlevées ; malheur à
moi, pour la tristesse de ce temps !...
Voyez donc : des choses arrivent qui n'étaient jamais advenues
dans le passé : le ro est enlevé par les pauvres...
Ce que cachait la Pyramide est maintenant vide. Quelques hommes sans foi
ni loi ont dépouillé le pays de la Royauté. Ils en sont venus à
se révolter contre l'Uraeus qui défend Râ et pacifie les Deux
Terres...
Les pauvres du pays sont devenus riches, tandis que les
propriétaires n'ont plus rien. Celui qui n'avait rien devient
maître de trésors et les grands le flattent. Voyez ce qui arrive parmi
les hommes : celui qui ne pouvait se bâtir une chambre, possède
maintenant des (domaines ceints de) murs. Les Grands sont (employés)
dans les magasins. Celui qui n'avait pas un mur pour (abriter) son
sommeil est propriétaire d'un lit. Celui qui ne pouvait se mettre à
l'ombre possède maintenant l'ombre ; ceux qui avaient l’ombre sont
exposés aux vents de tempête. Celui qui ne s'était jamais
fabriqué une barque a maintenant des navires ; leur (ancien)
propriétaire les regarde, mais ils ne sont plus à lui. Celui
qui n'avait pas une paire de bœufs possède des troupeaux ; celui qui
n'avait pas un pain à lui devient propriétaire d'une grange ; mais son
grenier est approvisionné avec le bien d'un autre...
Les pauvres possèdent les richesses ; celui qui ne s'était jamais fait
de souliers a maintenant des choses précieuses. Ceux qui possédaient des
habits sont en guenilles ; mais celui qui n'avait jamais tissé pour
lui-même a maintenant de fines toiles. Celui qui ne savait rien
de la lyre possède maintenant une harpe ; celui devant qui
on n'avait jamais chanté, il invoque la déesse des chansons... La femme
qui n'avait même pas une boîte a maintenant une armoire. Celle qui
mirait son visage dans l'eau possède un miroir de bronze...
Les (dames) qui étaient dans les lits de leurs maris, couchent
sur des peaux (par terre)... Elles souffrent comme des servantes...
Les esclaves (femmes) parlent tout à leur aise, et, quand leurs
maîtresses parlent, les serviteurs ont du mal à le supporter. L'or, le
lapis, l'argent, la malachite, les cornalines, le bronze, le marbre...
parent maintenant le cou des esclaves. Le luxe court le pays ; mais les
maîtresses de maison disent : « Ah ! si nous avions quelque chose à
manger. » Les dames... leurs corps souffrent à cause de leurs vieilles
robes... leurs cœurs sont en déroute quand on les salue.
Les nobles dames en arrivent à avoir faim, tandis que les
bouchers se rassasient de ce qu'ils préparaient pour elles ;
celui qui couchait sans femme, par pauvreté, trouve maintenant de nobles
dames.
Le fils d'un homme de qualité ne se reconnaît plus parmi d'autres : le
fils de la maîtresse devient fils de servante...»
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