Les Bretons en lutte contre la domination romaine

Le discours de Gralgacus (dirigeant de la lutte des Bretons)


En 84, le général romain Agricola mène une expédition en Écosse. Toutes les cités rassemblent leurs forces pour résister, et le chef Gralgacus leur tient le discours suivant :

« J'ai grande confiance que la présente journée et votre union rendront l'indépendance à la Bretagne [il s'agit de la Grande-Bretagne ; c'est au VI siècle seulement que les Bretons débarqueront en Armorique et donneront leur nom à cette province] tout entière... Les combats antérieurs où, dans la lutte contre les Romains nous avons eu des succès et des revers, nous laissaient encore de l'espoir et des ressources... mais, à présent, la Bretagne est ouverte jusqu'au fond ; il n'y a plus de peuple derrière nous ; rien que les flots, des rochers, et, plus dangereux encore, les Romains, dont vous chercheriez en vain par l'obéissance et la soumission à éviter la tyrannie. Ayant pillé le monde entier, ayant fait partout le vide, n'ayant plus de terres à ravager, voici que désormais ils fouillent même la mer ; avides, si l'ennemi est riche ; arrogants, s'il est pauvre ; ni l'Orient, ni l'Occident ne les ont rassasiés ; seuls de tous les hommes, ils convoitent avec la même passion ce qui est riche et ce qui ne l'est pas. Piller, massacrer, voler, ils appellent faussement cela exercer l'autorité, et quand ils transforment une région en désert, ils parlent de pacification.
Rien de plus cher à chacun que ses enfants et sa famille : c'est une loi de nature. Les nôtres sont enlevés de force et réduits en esclavage... On nous demande en même temps des tributs, et leurs intérêts ; des terres et des prestations en blé ; des corvées pour ouvrir des routes à travers forêts et marais sous les coups. Les esclaves nés pour la servitude ne sont vendus qu'une fois et leurs maîtres les nourrissent : la Bretagne achète chaque jour son esclavage, et chaque jour l'entretient. De même qu'à la maison le dernier acheté des esclaves sert de jouet à ses compagnons de servitude, de même, dans cet univers asservi depuis longtemps, on s'en prend à nous, les derniers venus, pour nous envoyer à la mort : chez nous, en effet, il n'y a pas de champs fertiles, de mines, ni de ports où l'on puisse effectuer des travaux. De plus, la valeur et la dignité des sujets déplaisent aux tyrans, notre éloignement, notre isolement, s'il nous a protégé davantage, ne nous rend que plus suspects. C'est pourquoi, tout espoir d'indulgence vous étant enlevé, armez-vous enfin de courage, vous qui tenez le plus à la vie, et vous qui tenez le plus à l'honneur. »

 
Tacite, Vie d'Agricola, XXX-XXXI.


Révoltes et Révolutions dans l'Histoire de l'Humanité
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Dernière mise à jour : lundi 12 août 2013